L’utilisation des théories de propagation de fissures, brutale ou sous-critique, dans une optique de prédictions de la durée de vie de structures complexes, se heurte à leur intégration dans des codes éléments finis. Plusieurs solutions existent, chacune possédant avantages et inconvénients dans leur mise en œuvre et les résultats qu’elles donnent. Une première solution est l’utilisation d’éléments cohésifs pour simuler l’apparition et la propagation de fissures.
Une seconde solution consiste à modifier le maillage de la structure au cours du calcul, de manière à prendre en compte l’évolution de l’état de fissuration. Cette méthode est celle qui a été retenue dans le cadre cette étude : afin de prévoir la durée de vie de structures dont le seul facteur limitant serait l’avancée de fissure en leurs seins, le code Zebulon, développé conjointement par l’ONERA et le laboratoire des Mines de Paris, va être modifié.
Le principe de cette méthode de propagation, appelée méthode G-θ, consiste à définir un champs θ en tout point de la structure étudiée, et qui sera calculé à chaque itération du calcul, en même temps que les champs de déplacement. Ce champ caractérisera l’avancée de la fissure, et servira également à modifier le maillage de manière à prendre en compte l’évolution de cette dernière et son influence sur les champs mécaniques.
Principe de la méthode G-θ
De manière générale, le problème mécanique à résoudre s’exprime en termes de minimisation de l’énergie mécanique J de la structure Ω :
où ∂ΩT est la partie de la frontière de la structure sur laquelle est appliquée une contrainte T. Le principe des travaux virtuels nous permet alors de déterminer le champ de déplacement en tout point du maillage. Lorsque l’on considère en plus une fissure qui se propage, il faut tenir compte de l’énergie de création d’une nouvelle surface (suivant le critère de Griffith) : soit une extension élémentaire de la fissure (fissure notée Γ). L’énergie dissipée s’exprime alors comme suis :
Gc étant l’énergie de création de surface du matériau. Le problème à résoudre revient alors à déterminer le champ de déplacement qui minimisera l’énergie (J+D). Soit θ le champ caractérisant l’avancée de la fissure.
Considérons la fonction Fη telle que
Cette fonction caractérise une avancée élémentaire de la fissure dans la direction θ. Les différentes énergies calculées sur Ωη correspondent donc à un état de la structure consécutif à une propagation élémentaire. Le champ θ doit alors minimiser l’énergie totale de la structure, ce qui se traduit par
ou encore
où F=∇u+I. J(1)+D(1) est la dérivé de l’énergie dans la direction θ, également appelée dérivée de Gateau. La résolution d’une telle fonctionnelle se fait à l’aide d’algorithme de type Newton-Rafson, ce qui implique de connaître la dérivée seconde de l’énergie dans la direction θ, soit
La discrétisation de la fonctionnelle à résoudre amène le système suivant
où {gc} et {g} sont respectivement les vecteurs énergie de surface et taux de restitution d’énergie généralisé (par analogie aux vecteurs forces généralisées {F}), système à mettre en relation avec le problème mécanique, classiquement décrit comme suit
[K] étant la matrice de rigidité du système. Connaissant la solution mécanique {u} du problème posé, à front donné (soit, pour un champ θ donné), on peut alors déterminer une nouvelle valeur du champ θ induit par ce champ mécanique, et ainsi de suite (figure 1). Lorsque les deux champs inconnus du problème ont convergé, le problème est résolu pour l’itération courante.
Détail sur l’algorithme de résolution
Soit le problème à résoudre
avec
De manière itérative, nous déduirons les champs θi successifs par
où ε est un réel positif petit.
Propagation sous critique
Plusieurs solutions existent pour intégrer les oies de propagation sous-critique dans les algorithmes de résolution des codes éléments finis. Une de ces méthodes consiste, lorsque la propagation est décrite à l’aide d’une loi de Paris à remplacer l’énergie de surface D par une « énergie de surface équivalente » D qui jouera le même rôle.
La loi de Paris s’écrit
et donc, pour un nombre de cycle ΔN, nous aurons
En considérant l’énergie de fissuration D telle que
le problème alors à résoudre, comme dans le cas de la propagation brutale, est celui de la minimisation de l’énergie définie par J+D, soit que la dérivée de cette énergie dans la direction θ soit nulle. Ceci conduit à résoudre la fonctionnelle suivante
où n est la normale au front ∂Γ au point considéré. Ce problème n’est autre que la formulation faible de la loi de Paris sur le front de fissuration. La solution de ce problème peut alors être déterminée par le même algorithme que celui précédemment mis en œuvre.
Propagation effective